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A boire et à manger
3 mai 2009

Château de Pressac : monumental !

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Lorsqu'on choisit de passer hors des sentiers battus et emprunte la petite route de campagne allant de Saint Emilion à Castillon la Bataille (via Saint Etienne de Lisse), on peut apercevoir à un moment sur sa gauche un château surplombant des terrasses de vignes. C'est le Château de Pressac.

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Ce château, même s'il est plus stylé qu'il le fut autrefois, n'est pas un fort d'opérette. Il existait déjà au moyen-âge, et c'est ici même que fut signé le traité mettant fin à la guerre de cent ans (après la bataille de Castillon, village situé à quelques kilomètres).

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La vigne existe déjà depuis longtemps sur ce domaine, puisqu'au XVIIIème siècle, son propriétaire ramena de Cahors quelques pieds d'Auxerrois et les planta. Ce cépage prit le nom de Noir de Pressac dans la région Libournaise. Le Chevalier Malbec l'emmena ensuite sur l'autre rive de la Gironde et lui donna son nom, sous lequel il est le plus connu aujourd'hui.


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A la fin du XVIIIème siècle, le château était à l'abandon. Il faut attendre son rachat en 1860 par Maximin Josselin pour qu'il soit remis en état. Mais au niveau viticole, la révolution se met en route à l'arrivée de   Jean-François Quenin en 1997. Ancien directeur général de Darty, il a décidé de changer totalement de carrière professionnelle à l'approche de la cinquantaine. Il rénove alors le chai et le vignoble, mettant en place des terrasses sur les pentes les plus escarpées du domaine.

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Beaucoup de vignes sont à replanter, car ce fut fait auparavant dans une optique plus quantitative que qualitative. Ainsi, les merlots étaient plantés dans les terroirs les moins gélifs et les cabernets dans les plus froids. Or, si l'on veut obtenir maturité et équilibre, il faut faire exactement l'inverse : le merlot aime la fraîcheur et le cabernet ne mûrit que dans des sols chauds. Jean François Quenin réintroduit également le Noir de Pressac - logique - et la Carmenère. Cépage autrefois largement planté dans la région, il n'a pas été replanté après le phylloxera. Apporté au Chili par des Bordelais, ce cépage connaît aujourd'hui un immense succès.

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Pressac a la chance d'avoir trois types principaux de terroir. Sur le plateau, un sol argilo-calcaire semblable à celui des premiers crus classés. Sur les côteaux, un sol complexe géologiquement dont les pentes permettent un bon ensoleillement et un bon drainage. En bas de pente, des molasses mélangées à des colluvions. Au final, cela permet de produire un vin d'une belle puissance n'excluant pas la finesse. Depuis peu, le labour et le travail des sols des terrasses ont été confiés à un laboureur qui vient avec deux chevaux qui se relaient.

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Le chai est simple et fonctionnel. Plutôt que d'investir dans des jolies cuves en bois, Jean François a préféré miser sur des pigeurs pneumatiques. Il y en a un de chaque côté du cuvier qui se déplace de cuve en cuve grâce à un système de rail. Cela évite de briser efficacement le chapeau de marc et d'éviter que le moût passe toujours par les même chemins lors des remontages.

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Sinon, les vendanges sont bien sûr manuelles. Depuis peu, le raisin éraflé est trié par une machine à optique laser, beaucoup plus efficace et sûre que la dizaine de trieurs habituelle. Le raisin est ensuite légèrement foulé puis subit une pré-macération à froid avant de démarrer la fermentation alcoolique classique. Comme nous l'avons vu plus, il y a une succession de remontage et de pigeage, en nombre variable selon les millésime (ce sont les dégustations quotidiennes qui permettent d'en juger). Suit une période de macération post fermentaire à la durée toute aussi variable puis l'écoulage. Une partie sera entonnée de suite, mais une autre fera sa "malo-lactique" en cuve. Puis tout sera mis en barrique.

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Si l'on a déjà vu jusqu'ici que le nouveau propriétaire avait le souci du détail sur de nombreux points , cela culmine avec le choix des barriques. Il faut dire qu'une bonne partie du vin du domaine va y séjourner une bonne année : il vaut mieux qu'elles soient de bonne qualité. On voit alors resurgir les bons réflexes du businessman. Pour être sûr d'être bien servi, il devient actionnaire de son tonnelier. Il se trouve qu'un autre actionnaire fournit la tonnellerie en bois. Ainsi, il peut choisir lui-même le lot de bois sur pied qui va servir pour ses barriques. L'envoie sécher dans les Vosges. Puis les barriques sont faites à Gaillac, siège de la tonnellerie. Au final, il a exactement les barriques qu'il veut à un prix inférieur de 30% à celui du marché. Y a pas, on reste homme d'affaires toute sa vie ;o)

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J'ai pu déguster quelques barriques de 2008. C'est plus que prometteur. Pour avoir eu la chance de goûter pas mal de Médoc en visitant les châteaux pour mon livre, je savais que ce millésime a permis de produire de belles choses. Mais j'avais bu peu de "rives droites" jusqu'à maintenant.

Cabernet franc / carmenère : nez envoûtant sur la liqueur de fruits noirs, les épices chaudes. Bouche pleine, douce, aux tannins fondus, d'un bel équilibre. C'est long, frais, vibrant. J'adore.

Merlot : robe d'un noir d'encre. Nez plus discret, sur la myrtille et le pain grillé. Bouche dense, fruitée, aux tannins plus ferme (c'est le terroir argilo calcaire qui s'exprime). Longue finale avec une belle mâche.

Cabernet Franc :
nez sur la framboise et des notes poivrées. Bouche élancée, avec un fruit pur et des tanins fins et longilignes. Finale de belle puissance. Très beau.

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Puis je déguste quelques vins en bouteilles

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Rosée du Château de Pressac 08 : nez sur la framboise et la fraise "tagada". Bouche ronde, gourmande, légèrement perlante, d'un fruit éclatant jusqu'à la finale. Vraiment très sympa!

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Tour de Pressac 06 : nez sur la cerise noire et la fumée, quelques épices. Bouche ronde, fruitée, fraîche, avec des tannins très doux au départ, se durcissant en finale. On reste un peu sur sa faim.

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Clos du Chapelain 2002 (autre propriété de Jean François Quenin, située à Lalande de Pomerol): nez sur la truffe noire, le cassis, les épices. Bouche ample, douce, aux tannins soyeux, d'un bel équilibre général. Finale de bonne intensité sur des notes salines, puis ferreuses en dernière sensation. Joli vin en début de maturité.

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Château de Pressac 2002 : nez complexe, profond sur les fruits noirs, le sous-bois (après la pluie) ,le havane. Bouche de belle ampleur, jouant sur deux registres. D'un côté des tannins denses, veloutés évoquant le son viril du violoncelle. De l'autre une bouche élancée, vive, chantante, faisant penser une voix de soprano, pure, vibrante. Les deux chantant de concert pour le plus grand bonheur de votre palais. Au Finale, c'est le violoncelle qui l'emporte, descendant en solo vers des notes de plus en plus graves. Maestoso.

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L'art n'est pas oublié à Pressac. Durant les portes ouvertes, une exposition d'un club de peinture local se tenait au château. Le thème : les arômes du vin. L'amateur de liquoreux que je suis a trouvé celui-ci très évocateur avec ses coings, son ananas, son orange et son écorce. On reniflerait presque le tableau ;o)

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Il y a également deux invitées permanentes devant le château, originaires de Saint Quentin la Poterie. Quelque soit l'angle ou on les aborde, je les trouve absolument fascinantes, par leurs couleur, leur forme, leur texture, ou leur expression.

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Je sais pas vous, mais moi, je ne peux m'empêcher de penser que ces deux-là sortent tout droit d'un livre d'Hugo Pratt...

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Il y aurait encore tellement de petits détails à explorer, de choses à raconter. Par exemple que Jean François Quenin a remplacé Hubert de Bouard comme Président du Conseil des Vins de Saint Emilion. Une belle reconnaissance pour ce "jeune" vigneron qui n'est pas du cru, et qui a su faire reconnaître ses qualités par ses pairs.

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Merci à Jean François pour son accueil !

Commentaires
R
Très intéressant et presque "prophétique". Cette année, Pressac 2012 est la star des foires aux vins. Tout est parti en 10 minutes... Mais Bettane et la RVF ont 5 ans de retard ! Et le château est vraiment magnifique. Le vin ? On verra dans 7-10 ans!
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S
Je viens de visiter ce site de A a Z quel régal,ceux qui arrive a se payer du Rotchill que j'ai vu doivent bien se régaler.Tout est net et propre ce qui donne confiance pour toutes les démarches a faire. BRAVO
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L
Superbe, j'ai visité ce château il y a près de dix ans. Voila de beaux souvenirs qui sont pigés...<br /> <br /> Le travail sur les terrasses semble terminé. A l'époque, une défonceuse travaillait les sols. Quand au "patron", il ne semble pas avoir changé.<br /> <br /> merci,<br /> Laurent
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J
merci de me faire voyager à travers ces jolis"reportages",c'est comme toujours des jolies photos et toujours également des bonnes recettes à faire et à refaire!!!!continuez de nous faire réver!!!merci
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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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