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A boire et à manger
18 avril 2017

Retour en Bordelais : premier jour

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Pour ceux qui auraient raté les épisodes précédents, j'ai participé à deux road trips dans le Bordelais avec des amis belges. La première fois en 2014, la seconde en 2015. L'année suivante, mes amis sont allés en Toscane. Ludovic, qui organise ces voyages, avait cependant un goût d'inachevé : il restait quelques domaines que nous n'avions pu visiter lors de nos précédentes  tournées. Cela devait être résolu impérativement en 2017. Et, force de le reconnaître, Ludovic a réussi où nombre d'amateurs ont échoué.

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Mes amis sont arrivés dans le Bordelais en début de semaine. Le lundi, ils ont allés à Arcachon, et le mardi à Pessac-Léognan, où ils ont visité le chai starckien de Carmes Haut-Brion et déjeuné à Haut-Bailly (une "vieille" tradition). Je ne les ai rejoints que mercredi matin pour cause de déménagement, avec l'ancien appartement à vider intégralement et nettoyer, et le nouveau à aménager. Pour être précis, je suis arrivé mardi en fin d'après-midi à Pauillac et je suis allé à Pontet-Canet  voir mon ami Jean-Michel Comme. J'ai pu voir les derniers travaux en cours (les écuries sont en bonne voie) et déguster le 2016 et le 2015.

Il est à souligner que le 2016 comprend l'intégralité de la vendange du domaine. C'est probablement le seul Grand Cru Classé du Médoc à pouvoir (ou à oser ?) le faire. Il correspond bien au profil du millésime tel que les différent critiques l'ont ressenti : beaucoup de finesse et de fraîcheur, tout en ayant une maturité parfaite et une concentration importante, même si elle est imperceptible. Il est étonnamment accessible aujourd'hui, tout en ayant un grand potentiel de garde. Son aîné d'un an a un profil plus puissant et moins avenant pour l'heure (l'élevage en cours n'est pas encore digéré). On est plus sur un profil de type 2005.

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Mercredi matin, donc, je suis arrivé un peu en avance à Château Margaux. J'ai donc pu flaner une trentaine de minutes dans les parcelles qui bordent le village sur toute sa longueur. On ne peut que constater le bon état général des vignes et un âge vénérable des pieds.

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Cela faisait sept ans que je n'avais pas visité le domaine. Celui-ci venait alors de moderniser son cuvier et sa réception vendange. Depuis, beaucoup de choses se sont passées, dont la disparition de Paul Pontallier avec qui j'avais vécu des moments d'exception. D'énormes travaux ont été entrepris, sous la direction de l'architecte Norman Foster. Le défi était d'ajouter un nouveau chai sans qu'il dénote trop avec les bâtiments construits deux siècles plus tôt.

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C'est une réussite en ce qui concerne le toit. On pourrait croire qu'il est là depuis 1810.

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Pour le reste, ça peut se discuter... Mais l'essentiel est que l'équipe puisse travailler dans de meilleures conditions. Pavillon blanc est désormais vinifié et élevé près de ses "frères rouges". De nombreuses petites cuves inox permettent de faire des vinifications intra-parcellaires, mais aussi de nombreux essais comparatifs.

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Le  chai d'élevage de Pavillon blanc.

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Le cuvier bois d'origine est bien sûr toujours là. Il sert encore à vinifier les plus grandes parcelles de Merlot et de Cabernet Sauvignon. Les extractions sont minimales afin de ne rien extraire de grossier. La puissance et la sève de Margaux proviennent des presses, d'une qualité exceptionnelle.

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Une visite incontournable de la tonnellerie (qui assure un quart du volume nécessaire).

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Le chai d'élevage de première année. D'origine (1810) mais d'une étonnante modernité.

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Le chai de seconde année (1980) : 2015 s'en va, 2016 arrive...

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La vinothèque qui lui est adjacente est  le deuxième gros chantier de ces dernières années. Comme le chai, elle est invisible de l'extérieur, des  vignes ayant été replantées après les travaux. Le terroir ayant été chamboulé et l'espace alloué aux racines forcément limité, elles ne produiront jamais de raisins destinés à Château Margaux ou à Pavillon rouge. Toutes les bouteilles stockées ici constituent la réserve personnelle du château. Les conditions de conservation devraient leur permettre de tenir au moins jusqu'au XXIème siècle.

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Deux vins vont nous être servis. Un privilège que n'ont pas tous les visiteurs.

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 J'avais eu la chance de boire le Pavillon de Margaux 2009 en avril 2010. Il m'avait alors émerveillé par sa grande finesse et sa tension implacable. L'élevage qui s'est poursuivi l'a boisé un peu plus, sans trop le surcharger. La finesse est toujours là, même si elle est un tout petit peu moins évanescente. Ce vin colle parfaitement à l'image d'Epinal qu'ont les amateurs des vin de Margaux : une  caresse pour le palais. On sent néanmoins que cette légèreté est trompeuse : il y a une grosse cylindrée sous le capot qui le fera tenir plusieurs décennies.

Paul Pontallier m'avait servi en 2009 ce Château Margaux 2004. J'avais été alors séduit par sa texture évoquant le cashmere, mais aussi sa profondeur inattendue pour un millésime réputé un peu faible. En 8 ans, le vin s'est complexifié : le nez est maintenant magnifique. C'est un feu d'artifice dominé par des notes truffées (je crois qu'à l'aveugle, je serais parti sur un grand Pomerol). La bouche est pleine, sensuelle, charmeuse. Et puis, il y a cette fraîcheur et cet équilibre typique des 2004. Le genre de bouteille que je regrette de ne pas avoir acheté à sa sortie, car elle ne devait valoir qu'une centaine d'euros. Aujourd'hui, il faut débourser cinq fois ce prix. Certes, c'est excellent, mais à ce prix, je laisse ça aux plus fortunés.

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Après un repas au Pavillon de Margaux – qui ne mérite pas franchement un article sur ce blog – nous allons voir l'un des seuls "vins de garage" de Margaux : Marojallia. En 1999, Philippe Porcheron a pu acquérir 2.5 hectares de parcelles disséminées au milieu des Grands Crus de la commune. Son ancien propriétaire, Roger Rex, ne voulait pas qu'elles soient avalées par ses prestigieux voisins. Bernard Ginestet, enthousiasmé par le projet, propose sa maison pour l'héberger.

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Située à l'entrée du village de Margaux, on ne peut rêver mieux. Jean-Luc Thunevin et Murielle Andraud apportent quant à eux leur savoir-faire qui leur a réussi à Saint-Emilion. Marojallia est né.

Je n'en avais jamais bu jusqu'au repas de midi où il nous a été servi du 2006. Eh bien, c'est à peu près tout ce que je déteste (mais qui devait plaire aux américains) : très concentré, surmûr, boisé, avec des tannins puissants qui non seulement ne se sont pas fondus mais se sont asséchés. Même pas pu finir mon verre...

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Nous sommes dans la salle de dégustation de Marojallia.

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Au lieu d'une visite classique, nous assistons à une mini-conférence sur le Bordelais animée par Henri Faivre. D'une façon générale, c'était intéressant, avec une vision synthétique et pédagogique. Après, il y aurait eu beaucoup à redire sur la formation des croupes médocaines qui ne tenait pas compte des travaux de Pierre Becheler. Mais je n'ai pas relevé : on y serait encore...

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Le chai d'élevage. Rien de particulier à signaler.

Nous avons dégusté le second vin du domaine, Clos Margalaine 2014, rond, soyeux équilibré, pas trop boisé. Sympa. Le château Bouqueyran 2014 – appartenant aussi à Philippe Porcheron – avait une acidité beaucoup trop marquée, confinant à la verdeur. Rédhibitoire.

Source: Externe

Mes amis partent ensuite à Pédesclaux (Pauillac) pour découvrir le nouveau chai dessiné par Jean-Michel Wilmotte. Pour ma part, j'ai rendez-vous à Saint-Emilion à Tertre Roteboeuf. C'était le seul moment de la semaine où François Mitjavile était disponible.

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Un lieu intemporel...

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J'ai pu déguster les 2015 et les 2016 des domaines familiaux : l'Aurage, Cambes, Roc de cambes et Tertre Roteboeuf. Je retrouve le profil du millésime 2016, mais avec la démesure mitjavilienne : grande maturité (sans être excessive) équilibrée par une acidité vivifiante et tonique. Les matières sont douces, sensuelles, vibrantes. Quelle que soit la cuvée, on retrouve un peu le même profil, mais avec un degré de raffinement et d'expressivité qui vont crescendo, avec Tertre Roteboeuf comme acmé.

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L'année dernière, j'avais trouvé les 2015 impressionnants de puissance. Un an d'élevage les a amadoués, patinés. Ils sont maintenant beaucoup plus sages. On sent par contre toujours un millésime très solaire. Perso, je préfère les millésimes plus frais (2013, par ex).

Le soir, j'ai retrouvé mes amis à l'Hostellerie de Roques - rebaptisée en Fleur de Roques – où je n'avais pas mangé depuis des années. C'est toujours aussi recommandable :-)

Commentaires
D
Voici de superbes clichés qui nous donnent envie de visiter ces superbes caves. En espérant que la récolte 2017 ne soit pas trop maigre...
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Quand deux passions se rejoignent pour n'en faire qu'une: la gastronomie
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