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A boire et à manger
23 octobre 2005

Notion de terroir (2)

J'avais évoqué dans une première partie  l'importance du travail de la vigne dans l'expression du terroir. Mais cela ne répond pas à la question essentielle: qu'est-ce qu'un terroir?

C'est un lieu ou le sol et le climat ont permis à un (ou un assemblage de) cépage(s) de donner le meilleur d'eux-mêmes (à condition que le vigneron ait fait son travail correctement).

bourgOn peut admirer le travail qu'ont accompli les moines cisterciens en Bourgogne durant le Moyen-Age. Sans aucun moyen technique, ils ont su déterminer quels étaient les endroits les plus propices pour produire les meilleurs vins rouges et blancs de cette région. Au mètre près, leurs délimitations n'ont pas changé, et l'on peut s'apercevoir avec nos techniques actuelles qu'elles correspondent à des sous-sols bien différenciés...

Est-ce pour autant qu'un grand vin ne peut sortir que d'un grand terroir reconnu depuis longtemps? Vaste question, difficile à résoudre, surtout si l'on veut rester de bonne foi (et ce n'est pas facile lorqu'on parle de vin). Si l'on ne s'en tient qu'à l'aspect historique, l'onmission produit du vin depuis beaucoup plus longtemps dans le languedoc que dans le Bordelais. Du côté de Saint-Emilion, on peut remonter jusqu'au Moyen-Age, mais les grands crus du Médoc ne sont apparus qu'au XVIIème, voire XVIIIème siècle (et officialisés au XIXème). Alors que les vins du Languedoc sont produits depuis l'antiquité... Et pourtant, dieu sait que les uns sont autrement plus réputés que les autres...

Le débat franco-français à ce sujet est déjà relativement délicat... Je n'ose dire à quoi il ressemble lorsque certaines personnes osent émettre que l'on peut faire mieux en Californie ou au Chili... Avant même toutedeg1 dégustation, ils sont forcément moins bien que les vins issus de nos terroirs millénaires... Et l'on en revient au débat qui agitait les forumeurs de La Passion du Vin il y a un an  lors de la sortie du Film Mondovino. Ce film un tantinet manichéen séparait le monde du vin en deux: d'un côté les "terroiristes" qui défendaient becs et ongles le bon vin d'autrefois, de l'autre les "mondialistes" qui produisaient en quantité industrielle un vin standardisé... Est-ce aussi simple que cela? Peut-on vraiment en tant qu'amateur de vin de séparer le bon grain de l'ivraie? L' effet "terroir" est-il perceptible lors d'une dégustation à l'aveugle? C'est un un peu pour répondre à ces questions qu'il fût décidé par les fondateurs de LPV de faire une dégustation en semi -aveugle d'un certain nombre de vins. Je cite: " In Vino Veritas, la vérité est dans le vin, c'est ce que nous voulons vérifier lors d'une grande dégustation qui se tiendra à Bordeaux, au moment des présentations primeurs, au début du printemps 2005.

Cette dégustation a pour but de comprendre les différences d'approche, de conception du vin, dans la mesure où elles transparaissent dans les vins dont on parle dans ce film, ou dans des vins dont on peut dire qu'ils sont pensés, conceptualisés selon certains préceptes, une philosophie ou certains procédés. Elle ne revêt aucun caractère polémique.

Bien entendu, cette dégustation dépasse largement le cadre des vins dont on parle dans le film de John Nossiter et nous l'avons voulu ainsi pour nous démarquer quelque peu du contexte passionnel qui entourait les débats, mais aussi pour étendre le panel à des vins, finalement, issus d'une philosophie tiers, parce que nous gageons que le dualisme est quelque peu réducteur."

La dégustation se ferait en 4 parties correspondant aux cépages contenus dans le vin: pinot noir, Syrah, Malbec, assemblage bordelais (merlot/cabernet sauvignon/franc). Pour chaque série, nous saurions les vins qui seraient présentés à la dégustation, mais sans savoir dans quels verres ils se trouveraient (d'où le terme semi-aveugle).

sainteLe 3 avril 2005, cette dégustation eut bien lieu à Saint-Emilion en présence d'une quinzaine de membres de LPV (dont l'auteur de ces lignes), de quelques professionnels du vin (Stéphane Derenoncourt, François des Ligneris, Hervé Bizeul), et de critiques et journalistes spécialisés (Jancis Robinson, David Cobbold, Vincent Noce).

La première série fut celle des pinots noirs. Un vin domina les autres par sa grande classe. Il était si impressionnant que j'eus du mal à la croire français... Je ne pensais pas qu'un Bourgogne pouvait avoir une telle puissance que je le pensais du nouveau monde... C'était le Clos de Tart 2001.

Puis vint la série des syrah. Là encore, un vin domina de loin les quatre autres vins présents. Ce fut le seulmidnight_oil_lab où il ressortait dans les fiches remplies par les participants qu'il était typique de son terroir. Il était également le plus typique représentant de son cépage. Un des participants nota même: "the Guigal's touch"... And the winner was: "Midnight Oil" 2001 du domaine Sine qua Non... un vin californien... Damned! Les américains peuvent faire des vins de cette classe? Alors que la Mouline de Guigal, fleuron de la Côte rôtie, paraissait encore engoncée dans son élevage et n'avoir pour l'instant qu'un intérêt limité...

Arriva les Malbec: il fut assez diffcile de différencier les Cahors des vins argentins. Ce qui est sûr, c'est que des Cahors passèrent pour des argentins, et inversement. Autant dire que "l'effet terroir" fut là encore difficile à déterminer...

Epreuve finale: les "assemblages bordelais"... Là encore, bien malin celui qui pouvait détecter à travers la dégustation la domination d'un terroir sur l'autre. Ce que l'on peut dire, c'est que des vins se montrèrent plus séduisants que d'autres ce jour-là, et (pas de chance!), les vins du nouveau monde firent recette: le rollandplus apprécié fut le vin de Staglin, un des personnage les plus attaqués de Mondovino (vinifié par Rolland), puis un vin argentin (vinifié par Rolland), puis encore deux vins américains... Le premier français est Valandraud, vin de "garage" considéré" comme un parvenu par l'élite bordelais puisque n'existant que depuis une quinzaine d'année... et vinifié par Rolland... Décidément, serions-nous tous déjà contaminés par Parker?

Je ne sais pas. Mais ce diable d'homme a le don de rendre séduisant des vins dès leur jeunesse. Ce qui paraitrait intéressant serait de fait une dégustation "15 ans après" pour voir si le classement serait toujours le même. Peut-être alors le terroir pointerait le bout de son nez et montrerait la supériorité du Bordelais... Affaire à suivre...

En tout cas, cette expérience m'a montré qu'il était difficile d'être catégorique en matière de dégustation de vin. On fait du bon comme du mauvais des deux côtés de l'atlantique, et le haut-de-gamme américain n'a pas à rougir devant les fleurons nationaux. Au moins peut-on en conclure provisoirement qu'il n'y a pas besoin d'avoir un terroir reconnu depuis plusieurs siècles pour faire un grand vin...

deg3

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